lundi 12 juillet 2010

Les collines et la mer





La petite bergère regardait la mer, au loin, par delà les grandes étendues vertes, là où un jour, elle irait se baigner.

La petite bergère pensait, au sommet de sa colline, que la mer était proche, qu’il suffisait de suivre la pente abrupte et continuer vers l’est, toujours vers l’est, escalader une autre colline et continuer dans la direction du sable dont elle imaginait déjà, la nacre jaune, caresse rugueuse sur sa peau durcie par les vents du nord.

Elle ne savait pas qu’elle aurait pu marcher des jours et des jours pour rejoindre la mer au travers des collines qui se multipliaient chaque fois qu’elle atteignait un sommet.
D’autres l’avaient fait avant elle et s’y étaient perdus, avaient dû renoncer, épuisés d’avoir usé leurs bottes sur ces cailloux glissants.

Elle ne savait pas, la pauvrette, elle qui avait à peine eu le temps d’apprendre à lire et à parler aux humains, que ces collines étaient interchangeables et formaient autour de leurs victimes innocentes une ronde infernale se reconstituant au fil des escalades et attisant la fièvre des montagnes et l’envie de l’eau bleue.

Irait-elle un jour rejoindre la cohorte des ombres qui aspiraient à la lumière embrumée de l’océan ?
Abandonnant ses moutons aux chiens de berger …

7 commentaires:

  1. une chèvre de monsieur seguin...

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  2. @ Marcel
    Tourner en rond et se perdre à l'embouchure du cercle ...

    @ Aléna
    bêêêêe ...
    vais finit par écrire un bestiaire ici, les animaux sont de grands philosophes !

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  3. Petite anecdote que m'inspire votre texte : en Sardaigne, certains bergers des montagnes qui vivent en quasi autarcie et ignorent tout de la mer, considèrent que les habitants des côtes sont des "faux sardes", un peu barbares, parce que, entre autres choses, ils consomment du poisson, les produits de la mer.
    ( J'imagine que l'on retrouve ces oppositions traditionnelles un peu partout...)

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  4. @ Gilbert
    Très intéressant cette particularité. N'est-ce pas en quelque sorte la peur de l'inconnu ? Dans certaines régions encore, des gens n'ont jamais vu la mer et cette chose infinie doit leur apparaître bien mystérieuse.

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  5. Et si elle avait été grecque la pauvrette, elle aurait pu du haut de sa colline à de nombreux endroits contempler la mer ...

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  6. @ Les Héphémères
    S'il n'y avait qu'une colline seulement !

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