Elle m’avait proposé – ce n’était pas la première fois d’ailleurs, les autres fois, j’avais décliné – d’aller aux Ladies’night, une soirée cinéma réservée aux femmes. Le concept n’a pas l’heur de me plaire mais par amitié, sachant sa solitude de nouvelle célibataire exilée en Belgique, j’avais cru bon d’accepter cette fois-ci. J’imaginai que les soirées devaient être bien longues et même froides, elle qui vivait la plupart du temps sur la côte atlantique juste en face du Maroc.
Elle m’avait proposé d’aller prendre un apéritif chez elle juste avant le spectacle. On n’aurait ensuite eu qu’à traverser la rue pour aller au cinéma… Après mûre réflexion, je décidais de l’accompagner, lui téléphonais pour confirmer, l’apéritif était déjà passé à la trappe dans sa tête, elle ne m’en souffla mot, me donna rendez-vous à 19h15 pour être sûres d’avoir une place. Il y avait une sorte de tombola avant la séance et on pouvait gagner un bon resto, une séance de massage ou des produits de beauté !!! Elle me dit aussi qu’une autre personne viendrait avec elle.
Je ne sentais pas cette soirée, j’avais cherché le titre du film proposé, et il ne me disait rien qui vaille, moi qui aime le cinéma d’auteur, une stupide comédie sentimentale n’est pas de mon ressort !
Sans
conviction, je garai la voiture, et je débarquai au cinéma à 19h25 soit avec
dix minutes de retard (un record pour moi qui n’ai pas d’horloge intérieure en
dehors du travail !).
J’entrai dans un véritable poulailler, ça pépiait grave, il n’y avait que des femmes hormis quelques mâles égarés, femmes de tous âges, mais non muettes, je me sentais de plus en plus mal à l’aise, je n’aime pas les soirées sexuées et je m’imaginais déjà les bavardages intempestifs dans la salle obscure, moi qui vais au cinéma avec recueillement, un peu comme dans une église, me plonge dans l’ambiance en faisant abstraction de mon proche environnement et en ressors sonnée, transfigurée, enchantée ou horrifiée en gardant pour moi mes premières impressions en dehors de toute critique extérieure.
Oui, je
n’avais pas envie d’une séance de poulailler et je ne voyais pas mon amie et sa
suivante, j’eus beau balayer l’entrée, nada. Au poste d’affichage, le film
affichait « complet » et je vis avec effroi qu’on avait prévu le même
projection dans une deuxième salle, la rançon du succès ! Je n’avais pas
envie de me retrouver seule à voir un film nullos …J’attendais encore les dix
minutes réglementaires avant de rebrousser chemin, soulagée enfin.
Je téléphonais à mon amie pour dire que j’étais arrivée trop tard et que je ne l’avais pas trouvée …
Le
lendemain matin, elle passa chez moi pour m’expliquer qu’elle avait eu un
empêchement et n’était arrivée qu’à 19h40, elle était désolée que je ne l’aie
pas attendu, mais que le film était vraiment nul et que finalement je n’avais
rien perdu.
Je lui
confirmai que je n’aimais pas cette formule, que je choisissais mes films. Elle
acquiesça et me dit que d’habitude elle faisait la même chose mais je la
soupçonnais de penser le contraire …
Elle me dit
aussi ; préviens-moi quand tu vas au ciné la prochaine fois, on pourra y
aller ensemble, je lui disais oui en n’y croyant pas vraiment.
J’aime beaucoup C. mais je l’aime quand je l’ai en face de moi ; il y a une belle connivence quand nous discutons, mais dès qu’elle parle de futurs projets, j’ai appris à me méfier. Que de rencontres par elle élaborées, ont fini en queue de poisson, elle donnait rendez-vous, n’y était pas et quand on l’appelait, elle était en route pour l’Espagne ou le Portugal ou plus modestement la côte belge …et donnant l’impression qu’on l’avait mal comprise …
Elle m’a
dit dernièrement qu’elle est parfois dans son monde … je le crois aisément …
Et pour nos
rencontres je laisse faire le hasard, entre nous, c’est le meilleur ami qui
soit !