Tout
d’abord, j’ai remarqué des fils défaits qui traînaient ça et là, des petits
trous minuscules qui formaient des petits yeux multiples dans le tissu.
La machine
avait dû accrocher quelques fils mais quand les trous se multiplièrent quelle
que soit la nature de la matière, j’ai commencé mon inspection.
J’avais laissé
sous le lit un sac en toile avec des vêtements que j’avais ramenés de mon
ancienne chambre. Je me suis rendu compte que le sac était lui aussi troué et
en l’ouvrant j’ai trouvé des espèces de cocons disséminés ça et là. Parfois un
papillon blanc sortait du lot et même mon chat léthargique ne daignait pas lui
jeter un œil d’ailleurs à moitié ouvert.
Si j’avais
pu collecter la matière constituée par les trous, j’aurais pu lancer une série
de confettis multicolores mais ces confettis étaient invisibles voire
inexistants ou dans une autre dimension de la physique !
C’est alors
qu’ont commencé les cauchemars et leurs interférences avec ma réalité.
Je rêvais
que d’immenses papillons blancs ou noirs selon l’éclairage de mes songes
venaient me picorer le visage avec leurs antennes gluantes. Je me réveillais en
nage et j’allumais la lumière en m’armant de la tapette à mouche mais je ne
voyais aucune poussière d’ailes.
Puis
j’entendis des petits grignotements, ça ne pouvait pas être de souris car mon
chat malgré sa fatigue chronique avait gardé quelque gène de chasseur, je
l’avais déjà vu à l’œuvre déguisé en bourreau jouant avec une boule de pluches
qui se délestait au fur et à mesure de ses coups de pattes.
Le combat
était inégal et mes alliés (même le chat) inexistants.
Je tenais
pourtant à ces lambeaux qui un jour m’avaient servis de fringues, allais-je devoir
courir nu faute de fripes convenables ?
Tout ce que j’achetais finissait par être contaminé, je voyais des lignes
frêles lacérer mon canapé, les essuies, les draps servaient aussi à la
confection de dentelles en formation.
Je me rendis
chez un droguiste pour avoir un conseil judicieux mais les renseignements que
je collectais ça et là étaient contradictoires : les monstres ne
s’attaquaient qu’aux fibres naturelles, l’expérience me disait que ce n’était
pas leur domaine exclusif, j’achetais des dizaines de bombes d’insecticides
dont je parais les vêtements atteints ou susceptibles de l’ être par cette
érosion et je les enfermais dans des sacs étanches qui bientôt envahirent
presque tout l’espace libre de mon petit appartement ; j’entreposais alors
les paquets jusqu’au plafond dans ma salle de bain réduite au minimum, il me
restait à peine de quoi prendre une douche rapide en grelottant en pensant aux
compagnons indésirables qui, je croyais, continuaient à veiller sur mes ablutions s’ils avaient pu résister
aux produits chimiques.
Je ne suis
pas loin de la névrose obsessionnelle, d’une paranoïa papillonesque.
Je guette
avec effroi les bruissements d’ailes à l’orée de la nuit, je calfeutre les
fenêtres, en sachant bien que si l’ennemi est déjà sur les lieux, la chaleur ne
fera que raviver ses ardeurs.
A l’heure
où, désespéré je vous envoie cet ultime SOS, j’imagine que même les feuilles de
ma lettre pourraient elles-aussi faire l’objet d’un repas dévastateur
…j’entends presque déjà les bruissements de quelque insecte invisible qui
attend l’ombre pour se livrer à ses horribles méfaits...
Les phobies qui vous grignotent l'esprit,la vie
RépondreSupprimerUne sacrée souffrance pour celui qui est touché par cette maladie
Drôlement bien écrit, et décrit...lecture frissonnante
Ces insectes m'on fait trembler ....je cours m'acheter une bombe insecticide:-)
il y a des maladies qui appliquent les mêmes tactiques
RépondreSupprimerce n'est pas toujours la joie...
C'est un cauchemar, il est temps de se réveiller !!! Description minutieuse de l'horreur :-)
RépondreSupprimerBravo Saravati !
Je te conseille "Contes fantastiques" de Maupassant et, notamment, "Le Horla"... :-)
RépondreSupprimer@ NBC
RépondreSupprimerRassure-toi, ces insectes ne s'attaquent qu'à ceux qui pensent trop à eux ...Mais quelle détresse !
@ JEA
L'esprit malade souffre autant que le corps voire plus parfois ...
@ Fifi
Heureusement que le réveil existe, alors utilisons cette arme à bon escient. Merci Fifi.
@ J.Earthwood
J'ai écrit cette histoire sur base d'un fait "réel" observé, j'ai extrapolé et laissé mon imagination voguer.
Quand je l'ai publiée, en la relisant, j'ai repensé à la nouvelle de Maupassant. Dans mon subconscient, elle a dû m'inspirer et toi, tu as fait le lien ... :-)
...et là pas question de se planquer sous le lit ....
RépondreSupprimerQuel cauchemar !!!
RépondreSupprimerLes mites sont en train d'attaquer son crâne ...
@ Gérard
RépondreSupprimerPeut-être est-ce là leur quartier général !
@ Marcelle
Les idées que nous ressassons sont parfois nos pires ennemis ...
beaucoup aimé ce papillons
RépondreSupprimer:)
Merci, j'espère qu'ils ne te le rendont pas :-)
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